Pas de révélation fracassante, ni de révolution des modes de pensées, ce n’est pas mon objectif ici. Mais je ne vous apprends rien en affirmant que les réseaux sociaux sont le paradoxe de la combinaison d’un outil intéressant et d’un des plus grands fléaux sociaux du 21e siècle.
(faites-vous un thé/café avant d’attaquer la suite, c’est long)
En effet, l’utilisation des réseaux sociaux, dans le cadre d’un mise en avant d’une entreprise, une idée, un concept, une association, que sais-je, est un outil puissant, bien fichu, dans l’ensemble utile et surtout efficace. La plupart des informations locales, les évènements culturels, associatifs, et même personnels, sont souvent en priorité annoncés sur les réseaux sociaux, et parfois nulle part ailleurs.
Ils permettent de garder un lien, tout particulièrement avec les gens qui ont du mal à utiliser d’autres façons de communiquer avec leur entourage. Certaines personnes n’aiment pas téléphoner, d’autres détestent les messages écrits, et on ne peut clairement pas voir tout le monde tout le temps pour se donner les informations.
Question bonus : a-t-on réellement besoin d’avoir ladite information ?
Question bonus #2 : est-ce que le syndrome du FOMO (Fear Of Missing Out) ne serait pas créé ET alimenté par les réseaux sociaux (uniquement?)?
D’un autre côté, j’enfonce une porte ouverte encore une fois : ils sont extraordinairement chronophages (qui n’a jamais pris son téléphone/allumé son ordinateur pour chercher une info, été distrait par les notifications, et puis relevé la tête 30 minutes/une heure/deux heures/renseigner la durée de votre choix ici – plus tard, en ayant totalement oublié ce qu’iel voulait faire initialement?). Ils sont également assez malsains, en matière de santé mentale et d’estime de soi. Beaucoup de gens se comparent aux images artificielles, retouchées, et se sentent inférieurs. Même dans le cas où la personne qui publie quelque chose ne retouche pas son image, on publie rarement les détails du quotidien tels que sortir les poubelles, aller aux toilettes, se disputer avec la voisine pour de sombres histoires de crottes de chien, plier son linge, etc. On publie généralement des choses agréables, qu’on a envie de partager, telles que des vacances, des sorties, des évènements ou objets qu’on a trouvés intéressants. Le fait de poster ces choses intéressantes et agréables, même avec une intention de partage et aucune arrière-pensée négative, va contribuer à un fil d’actualité empli de choses « enviables », et générer potentiellement des sentiments de jalousie, découragement quant à sa propre vie/action, agacement, bref, tout un tas de sentiments dont on se passerait bien dans la vie.
Les échanges entre utilisateurs sont souvent absolument infâmes, car pas mal de gens se sentant « protégés » par leur écran se permettent de dire des choses qu’ils n’oseraient jamais dire en face de la personne. Plusieurs études ont trouvé un lien très net entre Anonymat et Comportement de Merde (ils ont utilisé un terme vaguement plus scientifique que ça, je crois, but you get the idea). Les comportements en ligne sont très souvent haineux, intolérants, radicaux, et soyons clairs, cons. Il est évident que tout le monde n’a pas compris que le fait de POUVOIR donner son avis sur tout ne doit pas être confondu avec une quelconque obligation de DEVOIR donner son avis sur tout. On notera également une très nette concordance entre le fait d’avoir un avis basé sur du vent (j’ai vu une (ou plein de) vidéo sur YouTube qui dit que/le beau-frère de ma voisine a dit que) et le fait de s’exprimer. J’ai remarqué que les gens qui ont une expertise sur un sujet donné, bien souvent, ne ressentent pas le besoin d’aller agresser les gens dans les commentaires d’un post avec plein de majuscules et de points d’exclamation sur Facebook.
Ajoutons à ça l’aspect pas propre des fesses DU TOUT des créateurs desdits réseaux sociaux, qui ne sont pas trop trop philanthropes, car au mieux ils se font de la thune de façon claire et officielle sur votre dos, ou alors ils cherchent des façons de contourner les lois, l’éthique et le sens moral pour se faire de la thune sur votre dos. En même temps, un service gratuit n’existe pas, c’est bien connu. Pourquoi développer des systèmes énormes, à grand coût, si ce n’est pour construire des empires de pouvoir et d’argent? On le sait tous, et on s’en accommode, tant bien que mal, ça nous dérange, mais finalement, c’est comme ça, on ne peut pas vraiment lutter, et puis y a quand même des vidéos de chiens vachement drôles sur Insta, et de super recettes de cuisine sur TikTok, et puis c’est quand même pas un mal de vouloir rire/se détendre, surtout quand on est fatigués en rentrant du boulot. De toute façon, ces réseaux sociaux sont super bien fichus : ils sont conçus pour être addictifs, en nous proposant toujours plus de contenu qui nous plaît. C’est d’ailleurs une des explications du lien entre radicalisation et réseaux sociaux : on ne voit que du contenu qui correspond à ce qu’on pense déjà, ce qui nous conforte dans nos opinions, sans jamais remettre en question nos réflexions et nos idées. Même si nous, on ne se radicalise pas, ça ne nous rend clairement pas plus intelligents ou ouverts d’esprit…
Il y a des lois qui se mettent en place, se développent, pour mieux gérer les problèmes générés par ces nouveaux outils et le monde tel qu’il est aujourd’hui. Par exemple, en Europe, le RGPD a été voté en 2016, et appliqué en 2018, imposant aux sociétés mettant en ligne des sites web l’obligation désormais de nous informer, nous usagers naïfs et au bon dos monnayable, lorsqu’elles collectent et utilisent nos données, en nous disant précisément ce qu’elles en font, et à qui elles les vendent, etc. C’est l’explication aux petites fenêtres qui apparaissent dès que nous nous connectons sur un site, et nous demandent si nous voulons des cookies. Ils ne cherchent pas à nous proposer un thé et une madeleine (mwahahaha Blague à la Papa Power), mais à avoir notre autorisation pour utiliser vos données, avec leurs petits camarades qui veulent nous vendre des trucs, pour se faire de la thune avec lesdites données, en nous proposant de chouettes pubs qui correspondent pile poil au besoin que nous avons là tout de suite, ça tombe bien il reste plus qu’à cliquer, c’est beau le progrès et la technologie quand même.
Ce RGPD, qui soûle un peu, parce qu’à chaque fois qu’on veut aller sur un site, on n’a pas forcément envie de passer 30 secondes – 4 minutes (par site) à trouver l’endroit où on peut décocher toutes les petites cases bleues qui demandent poliment si on veut bien leur donner notre âme. Certains sites rendent la démarche tellement obscure qu’on peut y passer laaargement plus de 4 minutes, voire même ne jamais trouver la page en question. Je fais partie de ces gens qui vont décocher toutes les petites cases bleues, et qui préfèrent ne pas se rendre sur un site plutôt que de cliquer sur Accepter, après avoir cherché en vain la fameuse page aux coches bleues. Que voulez-vous, on ne se refait pas, et J’AI HORREUR QU’ON M’IMPOSE DES TRUCS. Je préfère me passer d’un truc plutôt que de me laisser imposer un truc, et croyez-moi, ça m’a desservi un paquet de fois dans ma vie, et me desservira encore mille fois. D’ailleurs, à ce sujet, et au sujet des réseaux sociaux, ben justement, see below.
La fameuse RGPD est donc obligatoire depuis 2018 en Europe, et nous devons donner notre consentement pour que nos données soient exploitées. Il se trouve qu’un certain Facebook Europe a considéré que les règles, c’est pour les faibles, et eux ne sont pas faibles, loin s’en faut. Donc ils n’ont pas appliqué. Ils se sont fait remonter les bretelles par la justice (et gratifiés d’une jolie amende de presque 400 millions d’euros, quand même). Mais pas grave, ils s’en fichent, ils ont trouvé un plan B. Si on ne veut PAS être traqués dans notre activité en ligne, et que les données collectées ainsi soient exploitées pour leur faire encore plus de pépettes, ben faut qu’on leur paie un abonnement Forfait Sans Pub (de 10 à 15€ par mois environ). Alors, encore une fois, sur le principe, rien n’est gratuit dans la vie, et tout se monnaye. Mais comme tout le monde, je suis noyée sous un flot constant de mails de publicité, démarchage intempestif sur tous mes moyens de communication. Je fais pourtant partie de ceux qui prennent le temps de refuser tout ce que je peux, me désinscrire régulièrement, me désabonner, donc j’imagine à peine ce que doivent recevoir les gens qui cliquent sur Accepter.
En ce qui me concerne, c’est un peu la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Je n’aime pas ce qu’ils représentent, ce qu’ils font, ce qu’ils contribuent au monde, et je n’arrive plus à trouver que les vidéos de chats assis sur un robot-aspirateur en valent la peine. Je vieillis, visiblement, et mal. J’ai donc pris la décision de me casser, et j’aurais aimé claquer la porte en partant, mais évidemment ce n’est pas si simple. Facebook et Instagram ne sont pas QUE des trucs stupides et malsains. J’ai construit deux communautés qui me tiennent à cœur sur Facebook, et après avoir envisagé de les fermer, j’ai pesé le pour et le contre, et je me dis que ce serait franchement dommage de détruire du bon, à cause du mauvais. J’envisage donc de totalement fermer mon Instagram (le réseau que je préférais), et utiliser uniquement un profil Facebook (quasi) vide pour gérer la grosse communauté, en acceptant donc leurs fucking trackers.
Je n’ai pas encore trouvé de solution pour la petite communauté.
Je ne sais pas non plus comment je vais manager ce site, qui était tenu à jour via le profil Facebook TheBrownCat, mais je vais y réfléchir également.
Depuis quelques jours donc, je vis dans l’ensemble sans réseaux sociaux.
So far so good, j’ai évidemment VACHEMENT plus de temps pour tout, et mis à part les réflexes dus à des années d’utilisation, mon choix semble mon convenir. C’est bien entendu une affaire à suivre, mais je suis preneuse de vos réflexions/avis/retours sur ces questions. Une des choses qui se perd sur ces nouveaux médias, c’est l’art de la conversation, ou de l’échange construit et intelligent sur un thème donné. J’aimerais avoir cette conversation avec vous, s’il vous plaît, face-à-face ou en commentaire.
C’est à vous.
» Je fais partie de ces gens qui vont décocher toutes les petites cases bleues, et qui préfèrent ne pas se rendre sur un site plutôt que de cliquer sur Accepter » > Je suis pareille. J’aimerais faire comme toi et partir mais 1. sur FB je suis en contact, certes rares, mais quand même, avec quelques personnes avec qui je ne suis en contact nulle part ailleurs et je sais que ça serait couper définitivement que de m’en aller et 2. Insta, c’est le seul lien avec mon groupe de tricot messin… Donc pour l’instant, je suis en gratuit. Il faut dire que je ne publie quasi que des pétitions sur FB et rien que des commentaires sur Insta. Comme toi, je constate que pour la vie locale, ces réseaux sont hyper pratiques, c’est là que je me tiens au courant de toutes les expos par exemple.
Pour ici, c’est marrant, parce que tu vois qu’aujourd’hui, sans aucune invite des réseaux sociaux, je me suis dit : « Tiens, est-ce que Catherine aurait publié quelque chose de nouveau sur son blog ? » et j’y suis venue sans y être spécifiquement invitée. Et j’y ai découvert deux nouveau articles. Excellente surprise.
Sur les effets nocifs des plateformes de réseaux sociaux, je suis en train de traduire un rapport d’Amnesty sur les conditions d’utilisation de TikTok pour les mineurs et c’est terrifiant. Je t’en parlerai une fois par zoom ou dans la vraie vie (on peut toujours rêver). Il est dispo en anglais sur le site de l’organisation (titre : « I feel exposed »).
Au plaisir de continuer à te lire ici au hasard de mes visites.
Ah super! Je me demande justement quelle visibilité mon site aura sans RS, pour mes fidèles lecteurs dont tu fais partie… Pour l’instant, je me contente d’écrire, et ne pas chercher à répondre à cette question, mais elle est présente dans ma tête.
En ce qui concerne mon claquage de porte, il n’est que partiel, mais il y a plein de choses à prendre en compte, et je me rends bien compte de ce que je perds, en plus de ce que je gagne. Le tracking, au fait, de ce que j’en comprends, ne prend pas en compte que ce qu’on publie, mais également notre activité, ce qu’on lit, ce qu’on like, etc. Bref, je suis loin d’avoir des certitudes aujourd’hui, affaire à suivre!
Je vais aller lire ton article terrifiant, mais j’aimerais bien parler sur Zoom indeed, de toute ça et de la vie. Soon?
Hello Cat,
C’est une super profession de foi et super idée aussi. Même à mon âge , et mon peu de débrouillardise en rs, j’en garde encore un…
Mon rêve est de ne plus avoir portable et juste lire comme fait la sœur ( qui doit cependant donner mon 06 à Leroy Merlin pour une commande, ce qui m’embrouille après!)
Le téléphone? je n’aime pas que cela dure non non plus…
En fait , je pense aux gens même sans les voir, je leur écris parfois. Toujours heureuse d’avoir des nouvelles, sans forcément en donner moi-même. Il faudrait utiliser le temps d’utilisation des réseaux pour s’adonner à l’activité épistolaire avec bougie et tasse de thé, bien installés à son petit bureau muni de beaux c papier à écrire.
Hâte de te lire,
Maryse.
Mais tellement!! Je passe parfois des soirées (pas à la bougie, mais bonne idée!) à écrire des lettres, à l’ancienne, aux quelques personnes autour de moi qui aiment ce plaisir épistolaire, et c’est tellement agréable! C’est d’ailleurs pour ça que j’envoie tous les ans des cartes de vœux. Ce moment que je passe à écrire à chacun, en pensant à la personne/aux personnes concerné.e.s, c’est presque méditatif et en tout cas un grand plaisir pour moi, pas une corvée!
Donc si tu veux rejoindre mon gang de lettré.e.s, tu es la bienvenue.
Bises